Natourelle est pleine de vie et elle porte ses 20 mois avec assurance et toute la joie que peut emmagasiner un petit bout comme elle. C'est un bonheur de l'observer courrir vers moi dès qu'elle me voit arriver quelque part (même quand ce quelque part est chez moi ... puisqu'elle est gardée à domicile), lâchant tout ce qu'elle tient et bousculant le moindre obstacle sur son passage. Elle met d'ailleurs la même énergie à se diriger vers son repas où un gâteau, dès qu'elle entend le froissement du papier. Ce soir, elle avait placé avec beaucoup d'attention une poupée sur sa propre chaise haute, tout en discutant avec elle, en rapprochant la table de la chaise. Puis, m'ayant entendu ouvrir le micro-ondes, elle a poussé son cri de guerre "mannnnnnjjjjer !" avec force sourire, a attrapé la poupée sans ménagement pour la jeter par terre ... et prendre sa place sur la chaise ! Heureusement que toutes les mamans ne font pas cela ...
C'est pourquoi, quand des amis autour de moi sont touchés par de gros problèmes (enfants gravement malades), cancers, maladies orphelines, mon coeur se serre et l'angoisse m'étreint. Plus aujourd'hui qu'hier .. peut-être parce que la fatigue trouble les sens. Et si un jour c'était ma fille ? comme cela a été un jour mon mari ... si un jour on m'annonçait qu'elle est bipolaire, leucémique ?
Rien, bien sûr ne me met à l'abri des maladies graves et ne protège mes enfants. Le malheur, une fois qu'il est tombé sur vous, ne vous immunise pas, il n'y a pas de quotas "un membre amputé = 1 point, un décès =10, quand tu as atteint 7, tu peux opter pour une garantie tout risque).
La seule véritable différence que je vois à avoir "côtoyé" le malheur, c'est que je sais ... un peu plus précisément (car je ne prétendrai pas savoir mieux) ... la douleur que cela cause de voir quelqu'un qu'on aime souffrir, puis s'éteindre. On ne peut pas prendre une part de sa souffrance pour le soulager, le monde s'écroule autour de lui et de vous. Il s'en va et vous restez ... avec cet affreux sentiment de culpabilité qui met du temps à se résorber. Et pour rien au monde je voudrai revivre ça.
La vie est ainsi faite qu'elle avance en broyant quelques âmes au passage. Je n'idéalise pas, je ne suis pas naïve. Mais il y a des jours où je trouve cela insupportable ... au sens propre du terme. Mettre la tête dans le sable ne changerai rien. Comme restez cloîtrée chez moi d'ailleurs. Mais juste, quand la pression est trop forte, déposer au bord de la route le fardeau que représente cette implacable vérité : nous ne sommes à l'abri de rien. Et nos enfants idem. Les petits bonheurs quotidiens sont un fragile équilibre et rien ne nous garantit un ticket gagnant pour un radeau de première classe dans l'ocean de la vie.
Probablement donc que la seule chose justeà faire est de s'adapter. Admettre et s'adapter. Parce ce que l'homme est un animal qui s'adapte à son environnement, et qu'il n'y a pas de place en ce bas monde pour les êtres trop sensibles. Alors s'adapter, encore et encore et profiter - surtout - de tous ces petits riens de tous les jours ... les câlins de Natourelle et son regard si particulier quand elle prend conscience de ma présence dans la pièce, les histoires de Pomponnette, les "jolies choses" auxquelles elle pense, son premier "maman" écrit au dos d'une boite de kiri, son pouce levé devant un grand sourire pour dire à Maman que tout est OK quand la distance rend les voix inaudibles.
Quelqu'un m'a dit récemment que la peur n'éloigne pas le danger. C'est bien vrai. Mais ce soir, ce n'est pas la peur que je crains ... mais le danger...
Alors profite de l'instant, tu as raison on ne sait pas de quoi est fait demain.
RépondreSupprimerC'est parce que nous sommes, Dieu merci, inconscients de tout ce que l'on peut perdre que l'on construit nos vies avec enthousiasme......Si nous n'avions pas cette forme de foi dans un l'avenir nous aurions une vie bien triste et fade.
RépondreSupprimerEt ce qui est formidable c'est que justement parce que leur Papa croyait en son avenir, Natourelle et Pomponnette sont là aujourd'hui. Si la peur l'avait inhibé, il n'aurait pas eu ce grand bonheur de leur donner la vie....
Posséder c'est risquer de perdre........mais ne rien avoir à perdre c'est bien plus triste encore.
Vous avez raison toutes les deux. Je ne fuirai pas à Samarcande et je regonflerai mon moral au contact de ce qui fait de la vie un truc vraiment sympa : les amis, les enfants, le jardin, une bonne glace, un café ..
RépondreSupprimeret oui, finalement le meilleur antidote contre le mal-être, ce sont des petits grains de sable dans l'engrenage du coup de pompe !
Alors ... bonne journée
on a toujours peur pour ses enfants, toujours, quelque soit l'âge. On se dit qu'en tant que parents, on aimerait leur éviter, la peur, le danger, la douleur. La peur et la douleur, on sait gérer en tant que parent, le propre du danger c'est qu'on ne le voit pas arriver et qu'on n'est pas toujours là pour y parer. Le propre des enfants, c'est qu'ils veulent vivre eux aussi, et qu'on ne peut pas les mettre sous cloche et leur éviter les dangers, même quand on sait qu'il y vont droit...
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